Le vent, dans les
grands arbres, soupirait doucement, Comme un chant de prière échappé du
couvent. Lamartine (Jocelyn.)
Nous ne disions rien. Ce n’en était pas la peine. Aucun de nous deux ne disait
rien, et pourtant, en nous deux, tout parlait. C’était comme ce souffle à peine
perceptible qui glisse entre les feuilles un soir d’été — pas un vent, non,
juste une présence. Juste la vie qui montre discrètement qu’elle est bel et
bien là. Un effleurement. Je l’écoutais dans notre silence. Je nous écoutais ne
rien dire. Comme on écoute les arbres. Sauf que là, je guettais les frissons.
Les siens. Les miens. Et les rares sons qui émanaient de sa bouche, des hmmm et
d’autres hmmm, se posaient sur la peau comme un soupir que j’aurais déposé sur
sa nuque. Ou que j’aurais reçu sur la mienne. Ou au creux d’une oreille.
Le vent jouait dans les feuillages comme un musicien distrait sur une harpe verte. Jean Giono (L’homme qui plantait des arbres.) Le psithurisme de ses gestes me parcourait avec délice. Ce froissement léger de sa main contre la mienne. Ou sur ma hanche. Cette manière de me regarder à travers ses yeux clos. Tout en nous n’était qu’alanguissement. Patience et respect. Rien n’avait besoin d’être réellement dit. Et encore moins crié. À peine chuchoté. Et c’était parfait ainsi. L’amour, le vrai, n’a pas forcément besoin de hurler ou d’être hurlé. Il se glisse subtilement dans les silences. Il rampe dans les interstices de moments partagés. Il bruisse. Il est là dans le vent discret qui fait parler les branches. Dans le souffle chaud derrière une oreille. Dans l’ombre d’un mot doux qu’on peut ne pas toujours prononcer.
On entendait, dans le lointain, le frisson des peupliers. Gustave Flaubert (L’Éducation sentimentale.) Deux dans les attentes. Entre autres celle d’un zéphyr pour se rappeler tous les espoirs. Il est dans ces moments langoureux, ces repos du guerrier quand tout n’est plus que calme et volupté. Peut-être que quelque part, tu étais mon arbre et moi, je suis ta clairière. Et ensemble, nous parlons le langage anciens des feuilles qui dansent, parfois, vivement mais souvent furtivement. À cet instant, je suis si bien que je pourrais m’endormir. Ou pleurer. Mais je vais me repaître d’écouter ton souffle, ce murmure sur ma peau. Ces frémissements qui sont ce lent passage de l’un à l’autre. Pas utile de se dire « je t’aime », ça respirait entre nous. Nos silences parlaient pour nous. Nos silences parlent pour nous. Nos si lents silences.
https://cestecritbysibal33.blogspot.com/
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire